Arrivée

D'un léger mouvement de tête, Morrighan laissa descendre son capuchon.

Cathara, enfin. Après plusieurs jours de voyage depuis Crystallia, elle touchait au but. En ces temps de troubles, il ne faisait pas bon voyager à travers de pays, surtout pour une femme, seule de surcroît. Bien sur, de par sa nature, personne n'aurait osé s'attaquer à elle, mais, depuis que Karya s'était libéré, plus rien n'était sur. Les routes qui serpentaient à travers le pays offraient une relative sécurité mais on était pas à l'abri de tomber dans une embuscade. Et les tensions "inter-races" ne faisaient qu'accentuer ce climat d'insécurité. Cathara, siège de la Brigade d'Epuration, était, de par son statut de grande ville, un endroit sûr ou seuls étaient admis les membres de la Brigades et quelques rares voyageurs. Morrighan, s'étant abîmé un instant dans la contemplation de la ville, se reprit et se dirigea vers les gardes qui encadraient la lourde porte d'entrée de la cité.

"J'ai nom Cliath Morrighan, de la cité de Crystallia, je désirerais rejoindre les rangs de la Brigade, pourriez-vous m'introduire auprès de vôtre chef?"

Elle sentit le regard des gardes la toiser de haut en bas avec un oeil intéressé, la poussière de son long voyage, agglomérée sur son corps dans ses cheveux et sur ses cils, ne suffisait pas à faire se détourner d'elle les regards empreints de désir. Elle vit les yeux des gardes, éclairés par une lueur de convoitise, faire des aller et venues entre les longs cheveux blancs qui se devinaient sous son capuchon et son corps menu dont une tenue de voyage cintrée faisait ressortir les attraits. Elle en se formalisait que très rarement de ce genre de regards, elle s'y était habituée et était même satisfaite de l'effet qu'elle ne manquait pas de produire.

Morrighan suivit docilement le garde. Certains signes physiques indiquait son origine elfique, il n'y avait rien à craindre, les elfes et les fées s'étaient toujours bien entendus. A mesure qu'elle progressait dans les rues sous bonne escorte, elle laissa son regard flâner au gré des rues qu'il traversaient, réalisant, plus que jamais la puissance et la prospérité de la ville. Elle ressentit au fond d'elle se renforcer cette impression de sécurité. Des étals de marchand ambulants, des gens qui se saluaient dans la rue, s'accostaient aux fenêtres, les échoppes distillant leurs odeurs de cuirs, de pain, de fleurs les bruits familiers des lames d'épée qu'on bat, le bourdonnement des conversations.

Morrighan se sentait à l'aise, cette cité était vivante, avait une âme. Étrangement, la céleste Crystallia, son éclat sa quiétude et sa légèreté lui manquait très peu. Bien sur, les farfadets avaient cet avantage de n'être pas attachés à la vie citadine tout en sachant jouir de ses quand l'occasion se présentait. En parlant d'occasion, sa gorge avait été asséchée par son long voyage, un petit verre d'hydromel ne serait pas de refus. Elle chercha des yeux une taverne ou aller se désaltérer une fois son entretien fini. Cela serait l'occasion d'aller à la rencontre de ses futurs alliés.

Comme le garde l'introduisait dans une salle de réunion vide,Morrighan réalisa qu'elle allait être introduite auprès du seigneur de Catahra... dans sa tenue de voyage, chose qui pour elle était inconcevable. Elle n'était pas aussi empressée que cela de rencontrer le maître de Cathara et se dit qu'il aurait peut être mieux valu qu'elle demanda à pouvoir se changer. Bien que son état de farfadet la détachait quelque peu des conventions, elle n'en restait pas moins une femme, consciente donc, de l'importance d'adopter une tenue de circonstance en présence d'une personnalité importante (chez les farfadets l'aspect vestimentaire était une très importante marque de respect envers l'interlocuteur).

L'interrogation du maître concernant la raison de son engagement ne la surprit pas: "Je porte en mon coeur les braises de la haine, peu m'importent les révoltés, leur chef seul les attisent. Si vous me permettez de vous raconter mon histoire je pense que cela vous éclairera davantage qu'un long discours"

Morrighan ferma les yeux, prit une profonde inspiration, se préparant à répondre au maître de Cathara:
"Comme vous l'avez dit, beaucoup des miens sont morts...." Morrighan eut du mal à poursuivre, les larmes qu'elle croyait avoir vaincus lui montant aux yeux:
"Notamment des membres de ma famille. J'ai donc été, depuis longtemps été élevée dans la haine des révoltés et de ce fourbe de Karya. Ils doivent payer pour ce qu'ils ont fait à mon peuple. Ils nous ont décimés, persécuté et forcés à nous cacher pendant longtemps. Je suis déterminé à le faire payer moi même si je le peux, je veux le voir à terre, acculé et l'entendre implorer son salut! On ne peux laisser impunie la souffrance qu'il a causé à trop de peuples de cette terre.
J'ai à coeur de mettre mes pouvoirs au service de la Brigade, si ils peuvent servir votre cause."

J'ai pour moi ma détermination, la haine que j'ai pour les révoltés, et la peur n'a aucune emprise sur moi. Quand à la mort: j'y suis préparé et si je me tiens aujourd'hui devant vous, c'est pleinement consciente de la difficulté que comporte une telle implication.

" Ne craignez rien, mes larmes ne coulent pas aisément et je saurais me montrer forte." Dit elle, sa déterminations se lisant clairement dans sa voix. Elle appuya ses paroles d'un bref et sec hochement de tête.
Elle remercia le maître, se préparant à se retirer, puis se ravisa: "Aurais-je un jour l'honneur de voir votre visage?" Avança-elle.

Morrighan, satisfaite, adressa un petit sourire amusé au maître de Cathara: "Une dernière question, comment dois-je vous nommer?" Termina-elle poliment. Visage dissimulé ou non, elle sentait qu'elle pouvait faire confiance au maître de Cathara